Histoire écrite par @LexisErine
Elle est assise en bout de rangée de sièges, près de la porte du métro. Moi, debout, adossé contre la carcasse de métal, face à elle. Sa tête est penchée sur le côté gauche, ses yeux rivés sur son smartphone. Ses cheveux aujourd’hui en liberté, laissent tomber ses boucles brunes sur ses épaules. Sa tenue est simple, mais élégante comme toujours. Un pantalon noir et un haut fluide noir parsemé de motifs bleus assortis à ses yeux. Un haut que j’aimerai soulever pour pouvoir y glisser mes mains et sentir le grain de sa peau.
Moi, comme chaque matin, survêtement pour mon jogging matinal, que je troquerai contre un autre pour la journée, une barbe de quelques jours, des cheveux hirsutes cachés sous ma capuche et des écouteurs vissés dans mes oreilles.
La belle et le clochard. Voilà à quoi je pense en la voyant chaque matin. Elle, belle, lumineuse. Moi, négligé et sombre. Une femme dont je n’obtiendrai rien. Même pas un regard. Mais comme je peux la comprendre. Qui aurait envie de m’accorder ne serait-ce qu’une seconde d’intérêt ? Pourtant, je continue de la dévorer des yeux chaque matin, depuis des semaines. A imaginer mes mains sur les courbes de son corps. Pourtant, je me surprends à espérer. Espérer…cela fait des mois que je n’espère plus rien de la vie jusqu’à ce premier matin à 7h13 exactement, ce matin où je l’ai aperçue pour la première fois.
La porte s’ouvre, et comme chaque jour, le métro est vite bondé, mettant la belle hors de portée de ma vue, jusqu’à ce qu’elle descende à sa station, laissant flotter dans l’air son parfum, et que moi, penaud, je rejoigne le parc pour mon jogging, jusqu’au matin suivant.
Les jours passent, rien ne change dans ce métro. Rien, sauf moi. Barbe entretenue, tenue de sport haut de gamme, cheveux coupés, coiffés. C’est dingue ce que l’amour peut vous faire faire. Parce qu’il s’agit bien de ça. Je suis fou de cette fille, de tout ce qu’elle est, ce qu’elle dégage. Elle m’a peu à peu ramené à la vie, sorti du gouffre dans lequel je suis tombé. C’est pour elle que je me lève chaque jour, pour la voir quelques minutes et rêver.
Et pourtant, rien. Je suis transparent. Y compris le jour où devant me rendre à un rendez-vous professionnel, rasé de près, j’étais paré de ma plus belle tenue de ville. J’avoue que depuis, je suis abattu mais je continue mon jogging tous les matins, pensant que je finirai par me faire une raison jusqu’à ce dimanche matin ou je n’avais pas la moindre idée de ce qui m’attendais. Adossé au métro comme la plupart du temps, les yeux clos, je suis concentré sur la musique qui défile dans mes écouteurs lorsque…Arrêt brutal. Extinction des lumières. Juste quelques secondes. Quelques secondes qui suffisent pour qu’une personne perde l’équilibre et se trouve collée à moi. Durant ces quelques secondes je ne vois pas, mais je sens. Je reconnais cette effluve, et une grande chaleur m’envahit au fur et à mesure que mes narines s’en emplissent. Ses mains m’enserrent la taille. Lorsque les lumières se rallument , mon corps s’embrase en croisant le regard de la personne en question, même si je savais rien qu’à son parfum que c’était elle. Elle plonge ses yeux dans les miens. Enfin. Enfin elle me voit, pour la première fois. Du moins c’est ce que je crois. Ce que je croyais depuis des semaines.
–Vous descendez toujours à la prochaine station ? Pour le parc ? Me demande-t-elle.
Mon sang ne fait qu’un tour et je remarque soudain qu’elle est en tenue de sport et que nous avons tous deux nos capuches sur la tête. Je suis incapable de prononcer le moindre mot. Je ne fais qu’une chose : la regarder. La détailler. Même dans cette tenue elle est si belle, rayonnante. Elle rougit alors. Je dois être un peu trop insistant. « Désolé » est le seul mot qui sort de ma bouche. Je repense à ces semaines durant lesquelles j’avais espéré un regard.
–Vos yeux, déclare-t-elle soudain.
–Oui ? Et bien ?
–Je les reconnaîtrais entre mille. J’ai tant attendu de les croiser.
Elle ôte ma capuche. Ses mains m’ébouriffent les cheveux et elle me sourit. J’ôte sa capuche, pose mes mains sur son visage et le lève vers moi. Nos lèvres s’effleurent. J’ai envie d’elle, là, maintenant. Je suis fou de désir. Ma bouche s’empare de la sienne. Ma langue cherche la sienne pour un baiser ardent. Nous ne sommes pas seuls mais peu importe. Je goûte à ses lèvres tandis qu’elle me serre encore davantage contre elle. Nous ne descendons pas à la station prévue. Le programme est modifié. Pas de parc mais sa chambre, dans laquelle je la dénude, en embrassant chaque parcelle de son corps. Où je l’effleure du bout des doigts. Dessine le contour de ses seins. Et sens couler son désir et son plaisir sur mes doigts, ma bouche Jusqu’à nous nous unir dans un souffle.
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